« Si je me présentais à la présidence de la République mon programme reposerait sur trois priorités : la recherche, la culture et l’éducation » expliquait avec enthousiasme l’astrophysicien André Brahic. Et d’ajouter : « La science est un moyen de lutter contre la violence, laquelle n’est pas la fille de la pauvreté, mais de l’inculture ». André Brahic nous a quitté le 15 mai dernier mais son énergie, son enthousiasme, sa générosité, et son attention aux autres marquent à jamais ceux qui l’ont connu, côtoyé, et dont il a changé la vie. Et pour toutes les personnes qui l’ont écouté en conférence, où entendu à la radio et à la télévision – ils sont très nombreux –, il fut l’image même de la passion, du professeur que nous rêvions tous d’avoir. Il fut aussi un chercheur hors norme, non académique, libre et joyeux, maniant la langue et l’humour à une vitesse proche de celle de la lumière. Il se serait beaucoup amusé du communiqué d’hommage qui lui fut rendu par l’Elysée saluant la disparition du « découvreur des anneaux de Saturne » ! Nul doute que le politique se trompant de planète lui aurait inspiré un bon mot et permis de rebondir sur la formation de nos élites et du personnel politique…
En défendant, sous forme de boutade, que pour être candidat à la président de la République il fallait être « au moins titulaire d’une thèse », il pointait du doigt des sujets dramatiques pour notre société : le manque d’investissements dans la recherche publique ; le poids croissant des lourdeurs administratives ; l’incitation pressante à privilégier la recherche appliquée, fléchée vers les projets sociaux, au détriment de la recherche fondamentale et de la liberté qu’elle implique ; l’importance du partage des débats et des connaissances scientifiques dans la société. Et l’actualité, malheureusement, lui donne raison chaque jour d’avantage. Il a fallu une mobilisation de prix Nobel dénonçant « des mesures qui s’apparentent à un suicide scientifique et industriel » pour que le chef de l’état stoppe une part des annulations de crédits affectant les budgets des organismes de recherche. Avant que ne retentissement de nouveaux signaux d’alarme : ceux du décrochage de la « Recherche et Développement » en France et d’un désintérêt criant des gouvernants actuels pour une politique de « culture scientifique ». Seuls les discours officiels la présentent encore comme "prioritaire" ; des déclarations démenties par les faits.
Pour la première fois depuis sa création, il y a plus d’un quart de siècle, cette nouvelle édition des Nuits des étoiles ne sera pas soutenue par le Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Pourquoi ? Parce que cette manifestation nationale, gratuite, qui rassemble des millions de personnes en France autour d’une pratique de loisir et de science participative – celle de l’observation du ciel – est jugée « récurrente » ! Entendez par là qu’elle a lieu tous les ans et qu’elle n’apporte rien de neuf à un paysage où l’agitation digitale s’est substituée au lien direct avec la nature. Les protestations d’Hubert Reeves, parrain historique de la manifestation, et d’Olivier Las Vergnas, président de l’AFA, n’ont reçues aucune autre réponse qu’un détestable silence.
Ces probables « dernières » Nuits des étoiles sont dédiées à la mémoire d'André Brahic, leur fervent supporter, dont l’optimisme et l’énergie tiennent dans cette formidable injonction : "La vie est trop courte, ne perdez pas de temps. Allez au bout de vos passions".
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