Le journal de bord de Thomas Pesquet (14)

À Baïkonour, dans la capsule Soyouz. DR
L'astronaute Thomas Pesquet deviendra en novembre 2016 le dixième Français à voler dans l'espace. Chaque mois, il raconte les coulisses de son entraînement aux lecteurs de « Ciel & Espace ». Découvrez le quotidien de celui qui s'apprête à vivre six mois sur orbite à bord de la station spatiale internationale (ISS).

Épisode 14 : Baïkonour, premières impressions

« Ca y est, je suis à Baïkonour ! Pas encore pour partir dans l'espace — ma mission est prévue dans un an — mais pour assurer la doublure de mon collègue et ami Andy Mogensen, qui doit décoller le 2 septembre 2015 avec les cosmonautes Serguey Volkov et Aydyn Aimbetov.

Jusqu'à cette date, et même jusqu'au pied de la fusée qui les emmènera vers l'ISS, nous n'allons plus nous quitter. Nous sommes tous en quarantaine désormais, avec une limitation drastique des visites et l'interdiction formelle de serrer la main de qui que ce soit, pour ne pas risquer de tomber malade avant le lancement.

Baïkonour est conforme à la légende : c'est un centre spatial immense, absolument plat, perdu au milieu de nulle part à 3 heures de vol de Moscou, et où des pas de tirs qui semblent désertés sont visibles de loin en loin sous un soleil écrasant. Depuis que je suis arrivé ici il y a trois jours (entre parenthèses, dans un avion différent de celui de l'équipage principal, pour ne pas perdre deux équipages d'un coup en cas de crash...), je n'ai pas encore réussi à me défaire de cette impression de Far West.

Tout d’abord, une visite à mon vaisseau Soyouz

La première chose qu'un cosmonaute fait lorsqu'il arrive à Baïkonour, c'est une visite au vaisseau Soyouz qui doit l'emporter dans l'espace. Pour s'assurer qu'il n'y a pas d'ajustements à faire du côté des mesures du siège, du scaphandre, etc. Et aussi pour se familiariser avec la vraie capsule. Ma première impression ? Comparée au simulateur, elle est encore plus exiguë que je l'imaginais ! La grosse différence, c'est qu'on entre dans le simulateur par une porte latérale, alors qu'en réalité on se glisse dans le Soyouz par un hublot et on s'y laisse tomber.

J'ai aussi découvert que, pour la phase d'atterrissage, notre siège pouvait se redresser : si dans le simulateur on peut avoir l'impression d'avoir les genoux dans le menton, dans la réalité, ça peut être pire encore ! Le jour où je rentrerai sur Terre dans cette capsule, j'espère que l'équipe de recherche et de récupération des cosmonautes arrivera rapidement. Cela ne doit pas être agréable de rester plié là-dedans trop longtemps...

Cérémonie d'accueil à l'arrivée à Baïkonour. La jeune femme à ma droite est en costume traditionnel français. Du moins tel qu'on l'imagine au Kazakhstan ! Crédit : DR
Accueil à l'arrivée à Baïkonour. La jeune femme à ma droite est en costume traditionnel français...
Du moins tel qu'on l'imagine au Kazakhstan ! © DR

Pour finir sur une petite note culinaire : j'ai goûté à la nourriture des cosmonautes lors de mon dernier séjour à Moscou. Contrairement à l'image d'Épinal, il n'y a plus qu'un seul mets en tube dans la gastronomie spatiale des Russes. Il s'agit d'une compote de pommes aux fruits rouges. Rien d'exotique, donc !

Au menu : soupe et biscuits

À la différence des Américains, qui préfèrent les plats sous vide, les Russes utilisent encore beaucoup les conserves. Avec une prédilection pour les soupes. Ils consomment aussi beaucoup de biscuits. En orbite, Baïkonour étant au Kazakhstan, on a aussi de la nourriture kazakhe (qui pour moi ressemble beaucoup à la cuisine russe !).

Une chose est sûre : il faut manger de tout pour être astronaute. Bien sûr, nous avons un peu de choix, mais nous ne mangeons pas que ce que nous aimons, car il en faut pour tous les goûts. Et puis, nos repas sont faits pour nous tenir en bonne santé. Pas trop de sel, pas trop de sucres. Heureusement, pour varier les plaisirs pendant les missions longues, Russes, Américains et Européens s'échangent souvent leurs repas. C'est le marché noir de l'ISS ! »

 

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