La distribution des satellites de la galaxie d'Andromède va-t-elle remettre en cause le modèle de formation des galaxies ? L'astrophysicien Rodrigo Ibata et son équipe viennent de découvrir que la moitié des galaxies naines en orbite autour de M 31 tournaient de concert, sur un disque de plus d'un million d'années-lumière de diamètre et seulement une quarantaine d'années-lumière d'épaisseur.
Parmi les signataires de l'article — petite singularité —, figure le propre fils du chercheur, Neil Ibata, âgé de 15 ans seulement. Ce résultat, obtenu grâce au télescope CFH dans le cadre du relevé PAndAS, laisse les théoriciens perplexes.
Une chance sur 50000 pour le hasard
« Le fait que les galaxies naines d'Andromède ou de la Voie lactée ne sont pas distribuées au hasard est suspecté depuis les années 1970, grâce aux travaux de Donald Lynden-Bell », note Pierre-Alain Duc, spécialiste des galaxies naines au CEA.
« Mais désormais, grâce au nombre de galaxies observées, c'est une certitude : autour de la galaxie d’Andromède, quinze galaxies naines tournent dans le même plan, dont treize dans le même sens », affirme l’astrophysicien.
Comment expliquer un comportement qui, selon l'article d'Ibata et ses collaborateurs, n'avait que 0,002% de se produire par hasard ?
Une collision majeure ?
« Au premier abord, on est tenté d'invoquer une collision très ancienne entre M 31 et une autre galaxie », répond le chercheur. Dans l'Univers, on observe de nombreux exemples de ces rencontres fertiles, d'où naissent parfois de petites galaxies baptisées « naines de marées ». Pourquoi ne pas imaginer que la galaxie d'Andromède et la Voie lactée, dans un lointain passé, aient interagi et fabriqué ces naines ?
Le fait que notre galaxie ne soit située qu'à 1° du plan des naines de M31 plaide dans ce sens. Cependant, « la caractéristique essentielle des naines de marée, liée à la façon dont elles se forment, est d'être vide de matière noire », souligne Pierre-Alain Duc. Les naines du Groupe local, dont celles d'Andromède, en sont au contraire remplies...
La matière noire s'invite
En fait, la seule façon de réconcilier le manège des naines de M 31 avec l'hypothèse d'une collision passée est d'utiliser l'hypothèse Mond. Dans ce cadre théorique — la matière noire n'existe pas, elle n'est qu'une « illusion » liée au fait que nous comprenons mal la gravitation —, tout s'explique.
Du moins pour ce cas précis car, à l'échelle cosmologique, « si Mond est valable, alors tout notre modèle hiérarchique de formation des galaxies est à revoir » reprend Pierre-Alain Duc.
Accrétion douce
C'est pourquoi le chercheur préfère une troisième piste : « Nous savons que les galaxies sont connectées à de vastes filaments de gaz froid qui les alimentent en gaz. Je suis persuadé que grâce aux simulations numériques, nous pourrons bientôt reproduire la formation d'un groupe de galaxies naines comme celles d'Andromède, via une accrétion de gaz. »
Un scénario beaucoup plus paisible, mais qui reste à démontrer. En attendant, les astronomes sont au pied du mur.
Très jeune découvreur
Parmi les scientifiques qui signent ce résultat dans la revue Nature, se trouve Neil Ibata, le propre fils du premier auteur. Cette curiosité a été remarquée dans la presse et Internet, parfois avec un enthousiasme excessif.
S'il faut certainement saluer la participation d'un lycéen à une recherche scientifique (Neil Ibata a contribué au développement d'un code informatique pour l'analyse des vitesses des galaxies), il faut répéter que, non, un ado ne vient pas de remettre en cause les théories d'Einstein... Espérons, pour finir, que d'autres ados (voire pourquoi pas des classes entières ?) aient un jour l'opportunité de cosigner des articles de ce niveau !
Ci-dessous, une vidéo qui montre la situation des naines dans le champs couvert par PAndAS.
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