Et si l’astéroïde interstellaire Oumuamua était couvert d’azote glacé ?

Peinture du planétologue William Hartmann, colorisée. Crédit : W.Hartmann/O.Hodasava
Une nouvelle hypothèse explique la nature d’Oumuamua. L’astéroïde venu d’en dehors du Système solaire serait constitué d’azote solide. Il s’agirait alors d’un fragment d’exoplanète glacée.

Nouvelle piste pour expliquer la nature d’Oumuamua, le premier astéroïde interstellaire jamais découvert. Selon deux publications le 16 mars 2021 dans le Journal of Geophysical Research : Planets (ici et ici), la surface de l’objet découvert en 2017 pourrait être essentiellement composée de glace d’azote. C’est la conclusion tirée par les deux auteurs de l’étude, après avoir considéré un éventail de compositions glacées pour leur enquête.

À l’approche du Soleil, le dégazage de sa surface subie par Oumuamua génère une impulsion supplémentaire, telle une petite fusée. En calculant cette accélération, les chercheurs ont constaté que seul l’azote permettait de reproduire les mesures de vitesse effectuées en 2017. Un coup d’accélérateur, longtemps intrigant pour la communauté scientifique.

La glace d’azote est également compatible avec la brillance élevée de l’astre, réfléchissant la lumière du Soleil, qui a été observée tandis qu’il s’éloignait déjà de notre étoile. Celle-ci a permis de déduire les dimensions du voyageur interstellaire dont la forme, d’abord comparée à celle d’un cigare, évoque aujourd’hui celle d’une grosse crêpe : 45 m x 45 m x 7,5 m. Initialement de forme quelconque, l’objet aurait perdu ses couches externes à la manière dont fond un savon, au fil de son entrée dans le Système solaire.

Fragment d’une exo-Pluton

Sa surface glacée azotée assimile Oumuamua à Pluton et à Triton, le plus gros des satellites de Neptune. Un constat duquel se dégage un scénario pour expliquer son origine. Celle d’un fragment issu d’une des innombrables collisions survenues dans les régions externes d’un jeune système planétaire en formation. Ainsi éjecté dans l’espace interstellaire, Oumuamua serait le premier échantillon d’exoplanète, ou d’exo-Pluton, à avoir été détecté dans notre voisinage. Une origine bien différente de celle d’un objet artificiel fabriqué par une intelligence alien, évoquée dans un livre en janvier 2021. Cette controverse avait montré, une fois de plus, qu’Oumuamua est un vecteur de propagande extraterrestre.

Sept Oumuamua par an

Dans une autre étude soumise le 4 mars 2021 à l’Astronomical Journal, mais encore en cours de validation, il a été estimé qu’environ sept objets du type d’Oumuamua traverseraient le Système solaire chaque année. Une fréquence calculée en faisant une hypothèse sur la densité d’astéroïdes errant en ce moment même dans l’espace interstellaire : 1 tous les 10 cubes de 150 millions de kilomètres de côté (soit 1 UA, ou la distance Terre-Soleil). En se basant sur la vitesse des étoiles voisines, délivrées dans le récent catalogue DR3 du télescope spatial Gaia, des chercheurs ont estimé que la moitié de ces objets voyageraient à une vitesse supérieure à 40 km/s. Plus lent, Oumuamua était arrivé en 2017 à une vitesse de 26,34 km/s, avant de voir sa trajectoire déviée par la force gravitationnelle du Soleil.

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Magazine Ciel & espace n°576 - avril-mai 2021. Dossier : L’eau et la vie, un duo rarissime dans l’Univers. © C&E

 

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