Jupiter et ses tempêtes comme vous ne les aviez jamais vues

Jupiter en infrarouge. © Gemini Obs./NOIRLab/NSF/AURA
L’atmosphère de Jupiter est constamment agitée de tempêtes, dont la plus gigantesque est la fameuse Tache rouge. En couplant les observations de la sonde Juno avec celles des télescopes Hubble et Gemini, une équipe d’astronomes est parvenue à décrypter ces systèmes tempétueux avec une précision inédite.

L’image la plus résolue de Jupiter

L’image la plus spectaculaire est celle obtenue par le télescope Gemini, situé à l’observatoire du Mauna Kea (Hawaï). L’instrument a observé la planète géante plusieurs années durant dans le domaine infrarouge, produisant ainsi les images de Jupiter parmi les plus précises jamais réalisées depuis le sol.

Cette vue de Jupiter est l’une des plus fines obtenues depuis un instrument au sol. Elle a été réalisée en compilant plusieurs dizaines d’images prises par le télescope Gemini. © International Gemini Observatory/NOIRLab/NSF/AURA M.H. Wong (UC Berkeley)/M. Zamani.

Les secrets de la Grande Tache Rouge révélés

En travaillant de concert avec le télescope spatial Hubble, Gemini a également produit des vues inédites de la Grande Tache rouge, qui ont permis de mieux comprendre ce gigantesque anticyclone de 15 000 km de large. Les mystérieuses petites taches noires qui la parsèment et que l’on distingue sur les photos de Hubble apparaissent au contraire très brillantes sur les clichés infrarouges collectés par Gemini. Ce qui suggère que ces taches sont en réalité des trous dans la couche supérieure de l’anticyclone. 

Toutes ces vues de la Grande Tache rouge ont été prises par Gemini et Hubble le 1er avril 2018. Sur les images d’Hubble (à gauche), on distingue des petites trainées/taches sombres. Sur celles de Gemini en revanche, ces taches sont très lumineuses. Ces observations couplées révèlent que ces zones sombres sont en réalité des trous dans les nuages d’altitude de l’immense anticyclone. © NASA, ESA, and M.H. Wong (UC Berkeley) and team.

Des éclairs trois fois plus puissants que sur Terre

Les deux télescopes ont également fait équipe avec la sonde Juno, qui tourne autour de Jupiter depuis 2016. Tous les 53 jours, la sonde s’approche au plus près de la planète géante (les scientifiques disent qu’elle est alors au perijove). À chacun de ces passages proches, elle scrute l’atmosphère et traque les éclairs (trois fois plus puissants que les plus puissants éclairs terrestres) dans les nuages épais. Dans le rayonnement dit visible, auquel le télescope Hubble est sensible, ces éclairs sont masqués par les nuages. Juno, elle, peut les voir grâce à ses instruments sensibles aux ondes radio, capables de traverser les nuages.

Au fil des 26 rase-mottes effectués jusqu’à présent par la sonde de la Nasa, les chercheurs ont pris soin de pointer également Hubble et Gemini vers Jupiter. Alors que Juno auscultait l’atmosphère de très près, déterminant notamment la latitude et la longitude des éclairs, Hubble et Gemini captaient quant à eux des images globales des structures auxquels les éclairs sont associés.

Des colonnes nuageuses gigantesques

Grâce aux données collectées par ce trio, les chercheurs ont ainsi découvert que les éclairs joviens surviennent dans des structures convectives complexes : de profonds nuages d’eau surmontés de tours convectives (des nuages possédant une grande extension verticale) formées quand de l'air humide remonte et, au sommet, une couche de nuages moins denses, qui s'établissent quand de l'air sec redescend. Ces colonnes se révèlent cinq fois plus hautes que les nuages terrestres similaires.

"Même si nous espérions détecter des éclairs avec Juno, la sonde n'a pas été conçue spécifiquement pour cela. Nous sommes donc agréablement surpris d'en détecter avec autant de précision, et de pouvoir les corréler aux structures nuageuses, nous explique Micheal Wong. Lors des prochains passages au périjove, Juno mènera des observations haute résolution notamment dans la région des cyclones polaires, où de nombreux éclairs surviennent".

Parce qu'ils sont corrélés aux nuages d'eau, ces éclairs constituent de nouveaux outils pour estimer la quantité d’eau dans l'atmosphère de Jupiter, une donnée capitale pour mieux comprendre comment s’est formé la planète géante, mais aussi tout le Système solaire.

 

 
 
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