Fin du suspense pour l’étage inférieur de la fusée chinoise Longue Marche 5B. Dimanche 9 mai 2021, peu après 4 h du matin (heure de Paris), le tube de 30 m de long pour 5 m de diamètre est finalement entré dans l’atmosphère au-dessus de la péninsule arabique. Lancé à une vitesse de 7,8 km/s, il a poursuivi sa course au-dessus de l’océan Indien tout en se fragmentant. Selon la CNSA, l’agence spatiale chinoise, les débris auraient plongé dans l’océan à 4 h 24 à l’ouest de l’archipel des Maldives, à moins de 50 km des côtes de l’île de Kudahuvadhoo.
Un étage hors de contrôle
Depuis la mise sur orbite dix jours plus tôt de Tianhe, premier module de la nouvelle station spatiale chinoise, l’étage de fusée de près de 20 tonnes était hors de contrôle et perdait de l’altitude sur une orbite inclinée de 41,5° par rapport à l’équateur. Mais dans une bande comprise entre 41,5° nord et sud, impossible de savoir où et quand la trajectoire de l’engin allait prendre fin. D’après le journal maldivien Raajje, la garde côtière locale a aujourd’hui déployé ses troupes pour repérer les éventuels fragments de la fusée chinoise.
Si la situation a donné lieu à de nombreuses exagérations dans certains médias, la chute de Longue Marche 5B n’est pas un évènement anodin. Certes, par la prédominance des mers et des océans à la surface du globe, ainsi que la concentration des populations humaines sur de petites surfaces, le risque d’être victime d’une chute d’objet est extraordinairement faible… mais il n’est pas nul.
Pas de système de désorbitation prévue
Lors de son avant-dernière orbite, le débris immatriculé CZ-5B a survolé successivement la Turquie, l’Iran, l’Inde et l’Indonésie. À 15 minutes de sa rentrée atmosphérique, il surplombait l’Espagne. « Il apparaît que CZ-5B a été conçu pour faire exactement ce qu’il a fait », rapporte notre confrère Andrew Jones, spécialiste des affaires chinoises. Pour son étage superlourd — dans le top 6 des objets artificiels les plus massifs à être rentrés dans notre atmosphère —, la Chine ne semble donc pas s’être embarrassée d’un système de désorbitation contrôlée, comptant sur les faibles probabilités de dégâts encourus.
Pour son tir inaugural en mai 2020, l’envol de la Longue Marche 5B avait été suivi d’une chute non contrôlée dans l’océan Atlantique. Mais certains fragments, dont un tuyau de 12 m de long, avaient atteint une zone habitée en Côte d’Ivoire. En 2021, une Longue Marche 5B décollera à deux reprises pour mettre en orbite les modules Wentian et Mengtian de la station spatiale chinoise. Pour ces lancements, la CNSA comptera-t-elle de nouveau sur les lois du hasard ?