La Terre bombardée par les astéroïdes

Vue d'artiste de l'explosion de la Toungouska. Crédit : Lionel Bret/Ciel et Espace Photos

Le 30 juin 1908, il y a exactement un siècle, un petit corps céleste explosait au-dessus de la Toungouska, une région désertique de la Sibérie. La nature de ce bolide n’est toujours pas connue et les scientifiques cherchent encore des indices sur cet événement (lire Ciel & Espace n°458, juillet 2008). Mais entre temps, la connaissance des impacts sur la Terre a considérablement progressé.

Les cratères d’impact dans le monde

En complément de la carte des cratères météoritiques connus sur la Terre, publiée dans Ciel & Espace (juillet 2008), voici un petit tour d’horizon des cratères les plus remarquables, avec les commentaires d’Éric Robin, spécialiste du sujet au CEA.

On reconnaît un cratère d’impact à…

… certaines preuves ! La présence de quartz choqués en est une. La collision crée une onde de choc qui traverse la roche à très grande vitesse et qui la comprime tellement que les cristaux qu’elle contient se déforment et se transforment en verre. Appelés quartz choqués, ils sont facilement détectables au microscope. «D’autres indices se voient à l’œil nu, ajoute Éric Robin. Autour d’un cratère, on trouve des morceaux de roches qui sont retombés après avoir été éjectés. Ces roches comportent des brèches ou ont été fondues.»

Sudbury et Vredefort, les records

174 cratères d’impact ont été identifiés sur Terre. Leur diamètre varie entre 1m et 300km. Les deux plus gros sont Sudbury au Canada (250km) et Vredefort en Afrique du Sud (300km). Ils sont aussi les plus anciens. Ils ont été formés respectivement il y a 1,8 et 2 milliards d’années.

Sudbury :

Crédit : DR

Crédit : DR

Vredefort :

Crédit : Nasa

Chicxulub, le tueur des dinosaures ?

Sur la troisième marche du podium figure le célèbre cratère Chicxulub, au Mexique, qui mesure 170km de diamètre. Il a été formé il y a 65 millions d’années, à la limite entre l’ère Crétacé et l’ère Tertiaire. Le bolide qui l’a généré mesurait près de 10km de diamètre. L’onde de choc produite lors de l’impact a pulvérisé tant de fragments de roche qu’une couche de poussière en suspension dans l’atmosphère a masqué la lumière du Soleil. Des années durant, il a fait «nuit» en permanence, ce qui a considérablement fait chuter la température moyenne à la surface du globe. Pour la majorité des spécialistes, cette catastrophe a causé ou précipité l’extinction des dinosaures qui régnaient sur Terre depuis 200 millions d’années. Les chercheurs savaient depuis longtemps qu’un gros impact avait eu lieu il y a 65 millions d’années. En effet, ils retrouvaient, sur l’ensemble du globe, dans des couches sédimentaires datées de cette époque, un excès d’iridium. «Ce matériau, contenu dans certains type de bolides est redistribué sur toute la surface de la planète lorsque les fragments éjectés lors de l’impact retombent», explique Éric Robin. Mais il a fallu du temps pour retrouver le cratère correspondant à cet événement. Et pour cause : au fil des millions d’années, il a été complètement recouvert. «Des forages effectués dans le Yucatan par les pétroles mexicains au début des années 1980 ont révélé des signatures d’impact tels des quartz choqués, raconte le chercheur. Puis, des analyses gravimétriques ont confirmé la présence d’un très important cratère.»

Chicxulub :

Crédit : LPI/Ciel et Espace Photos

Deux cratères pour l’Eocène

Parfois les cratères sont découverts avant leur signature céleste dans les couches sédimentaires. C’est le cas de Popigaï (100km), en Russie, et de Chesapeake Bay (80km), aux États-Unis. Âges respectifs : 35,5 et 35,4 millions d’années. «On pense que ces deux impacts ont été créés par un seul et même objet qui a peut-être été fragmenté lors de son passage près du Soleil», explique Éric Robin.

Popigaï :

Crédit : Nasa/JPL

L’impact mystère du Cambodge

Certains cratères manquent encore à l’appel. «Un niveau de microtectites-des roches fondues- dans les sédiments nous indiquent qu’un gros impact s’est produit il y a 800 000 ans, révèle Éric Robin. Nous pensons que le cratère correspondant doit se trouver quelque part au Cambodge et mesurer 50 à 80km de diamètre. Mais nous ne l’avons pas encore trouvé.»

Des cratères dans l’océan ?

En mer de Barents, au nord de la Norvège, se trouve le cratère Mjolnir. Formé il y a 143 millions d’années, il mesure une quarantaine de kilomètres de diamètre. Mais il gît en eau peu profonde. À l’heure actuelle, aucun cratère sous-marin, c'est-à-dire situé à plusieurs milliers de kilomètres de fond, n’a été découvert. C’est qu’une telle couche d’eau est susceptible de décélérer le bolide de sorte qu’il n’atteigne pas le plancher océanique. «Des carottages ont cependant mis à jour des roches fondues suggérant qu’un bolide de 500m à 1km s’est crashé dans l’océan Pacifique, au large de l’Argentine, dit Éric Robin. Aucun cratère n’a jusqu’à présent été identifié.»

Pour aller plus loin : suivez les visites guidées de Meteor Crater en Arizona et de Gosses Bluff, en Australie.

De nouvelles simulations numériques pour l’impact de la Toungouska

Quelle énergie a été dégagée lors de l’explosion du bolide de la Toungouska, le 30 juin 1908 ? Pour tenter de le savoir, pendant des décennies, les chercheurs n’ont eu à leur disposition que les photos du désastre : des arbres renversés dans des directions biens précises, sur des centaines de kilomètres carrés. Ils en avaient conclu que l’énergie libérée avoisinait les 15 mégatonnes, soit plus de 1000 fois l’explosion atomique d’Hiroshima. Des simulations numériques réalisées en 2007 grâce à des supercalculateurs au laboratoire Sandia, au Nouveau Mexique (États-Unis), suggèrent une valeur moindre, environ 5 mégatonnes. Les trois animations cliquables sur les trois liens "Découvrez l'événement en vidéo", situés sous la vue d'artiste de l'explosion de la Toungouska, illustrent ce résultat qui, toutefois, reste débattu par les spécialistes des impacts. Vous trouverez ci-dessous le commentaire de chacune de ces simulations.

Simulation n°1

Explosion de 5 mégatonnes à 5 km d’altitude

Cette simulation montre ce qui se produit quand un bolide qui est entré à 20 km/s dans l’atmosphère explose à 5 km d’altitude, en dégageant une énergie de 5 mégatonnes. La vitesse d’arrivée projette une boule de feu jusqu’à la surface de la planète (située sur le bord inférieur de l’image). Ce qui augmente la chaleur et le vent produits au niveau du sol.

Simulation n°2

Explosion de 5 mégatonnes à 12 km d’altitude

Cette simulation en trois dimensions montre une explosion de 5 mégatonnes survenue à 12 km d’altitude, pour un astéroïde arrivant avec un angle de 35 degrés par rapport à l’horizontale. La fenêtre mesure 40 km de large et 20 km de haut. Les couleurs indiquent la vitesse. La boule de feu n’atteint pas la surface (au bas de l’image) mais descend jusqu’à une latitude de 5 km avant de remonter. Au niveau du sol, l’onde de choc vient directement d’en haut, ce qui est compatible avec les observations des arbres restés debout à l’épicentre de la Toungouska (les «poteaux télégraphiques» décrits par Kulik, le premier scientifique à s’être rendu sur place en 1927).

Simulation n°3

Explosion de 15 mégatonnes à 18 km d’altitude

Cette simulation en 3 dimensions montre une explosion de 15 mégatonnes provoquée à 18 km de la surface, pour un astéroïde arrivant avec un angle de 35 degrés par rapport à l’horizontale. La fenêtre mesure 40 km de large et 20 km de haut. Les couleurs indiquent la vitesse. La boule de feu produite descend jusqu’à la surface. Elle glisse et s’étend à très grande vitesse, soumettant le paysage à un effet de blast et à des conditions similaires à celle d’un fourneau. Ce n’est pas ce qui s’est passé en Toungouska.

Recevez Ciel & Espace pour moins de 6€/mois

Et beaucoup d'autres avantages avec l'offre numérique.

Voir les offres

Commentaires

Nous avons sélectionné pour vous