Imaginez un avion à l’envergure plus vaste qu’un terrain de foot qui décollerait devant vous. C’est le spectacle auquel ont assisté les ingénieurs de Scaled Composites, ce samedi 13 avril à 6 h 58 (15 h 58 heure française), lorsque le Stratolaunch a pris son envol au-dessus du désert de Mojave, en Californie. Pour ce vol test d’une durée de 2 h 30, le géant de 230 tonnes à vide a atteint une altitude de près de 5 200 m. Capable de transporter une fusée sous son aile centrale, il sera bientôt une base de lancement aérienne — l’intérêt étant qu’à haute altitude, l’attraction terrestre est moindre, et donc un lancement de fusée moins coûteux en énergie.
Un choix difficile de fusée
Au début du projet, lancé en 2011 par le milliardaire cofondateur de Microsoft Paul Allen, une fusée Falcon 9 devait décoller depuis l’appareil. Propulsée par ses moteurs Merlin (ergols liquides), la fusée de la société Space X devait être capable d’envoyer sur orbite des satellites de plus de 6 tonnes. Fin 2012, face aux changements trop importants demandés pour adapter la Falcon 9 au Stratolaunch, Space X sort du projet. La fabrication d’une fusée adéquate, la Pegasus 2, est alors confiée à Orbital Science Corporation (désormais Northrop Grumman Innovation Systems) avant un nouvel abandon.
En 2016, nouveau retournement de situation, l’entreprise de Paul Allen annonçait que le Stratolaunch accueillerait jusqu’à trois fusées Pegasus XL à son bord — soulevant le scepticisme des observateurs quant à la rentabilité de l’opération compte-tenu des coûts de ces lanceurs. Et finalement, en 2018, c’est la création de lanceurs par Scaled Composites qui était annoncée pour 2022... L’un de taille moyenne (pouvant placer jusqu’à 3,4 tonnes en orbite) et l’autre de grande taille (6 tonnes).
Un futur incertain
La mort de Paul Allen en octobre 2018 a plongé l’avenir du Stratolaunch dans l’incertitude. Le mastodonte équipé de deux fuselages, mixte de pièces du Boeing 747 et de pièces spéciales en composite de carbone, va-t-il finir dans l’oubli, comme certain de ces prédécesseurs à l’image du Hughes H4 Hercules ?
Le milliardaire aurait laissé des instructions pour que son bijou de technologie d’une envergure de 117 m, pouvant atteindre 590 tonnes avec sa charge, ne disparaisse pas. Du moins, c’est ce que semble sous-entendre la société d’Allen, Vulcan Inc. Reste que les coûts de plus en plus bas des lancements des petits satellites viennent concurrencer ce projet, dont l’avenir reste encore incertain.
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