Les astronomes tiennent enfin leur graal. Treize ans après la découverte de la première exoplanète, des photographies de ces mondes situés autour d'autres étoiles que notre Soleil viennent d'être obtenues pour la première fois. Il s'agit même d'un coup double puisque ce sont deux équipes qui annoncent simultanément avoir réalisé cet exploit, dans la revue américaine Science Express datée du 13 novembre. Le groupe de l'Américain Paul Kalas a photographié, grâce au télescope spatial Hubble, une planète ayant environ la masse de Jupiter et tournant à 119 UA (1) de l'étoile Fomalhaut, visible à l'œil nu, à 25 années-lumière de la Terre. Pour l'équipe dirigée par le Canadien Christian Marois, la découverte est encore plus spectaculaire : avec les télescopes hawaïens Gemini et Keck, les astronomes ont tiré le portrait de tout un système planétaire. Trois planètes géantes autour de l'étoile HR 8799, à 140 années-lumière de nous. D'une masse comprise entre 7 et 10 fois la masse de Jupiter, elles tournent respectivement à 24, 38 et 68 UA de leur astre. Pour mémoire, Neptune circule à environ 30 UA du Soleil.
A l'origine de ces deux premières, un bond en avant spectaculaire des techniques d'imagerie. Dans un cas comme dans l'autre, les astronomes sont parvenus à éliminer la lumière éblouissante de l'étoile pour capter la pâle lueur des planètes. Pour sa part, Christian Marois a augmenté ses chances de réussite en pointant son instrument vers des étoiles jeunes, susceptibles d'héberger des planètes tout juste formées et évacuant encore leur chaleur, donc plus brillantes. C'est ce dernier phénomène qui les fait apparaître sur les clichés réalisés dans le proche infrarouge.
Sur les plus de 300 planètes extrasolaires connues actuellement, aucune n'avait pu être "vue" jusqu'à ce jour. Toutes en effet ont été découvertes par des méthodes indirectes. Soit par la baisse de luminosité de leur étoile quand elles passent devant celle-ci, soit par les petites perturbations qu'elles créent dans le mouvement de leur Soleil. Des clichés ont bien été obtenus ces dernières années, mais il ne s'agit pas à proprement parler de planètes. Certains de ces corps tournent autour de naines brunes (des étoiles ratées), d'autres sont trop éloignés de leur étoile pour s'être formés comme des planètes.
Le statut des nouvelles venues, en revanche, ne fait pratiquement aucun doute. Elles sont relativement proches de leur étoile. Leur mouvement de révolution a bien été observé. De plus, elles circulent à proximité, voire à l'intérieur d'un disque de poussières — sans doute le résidu de leur formation. On assisterait donc, à une échelle beaucoup plus grande, à la naissance de notre propre système. Reste maintenant à savoir si les deux étoiles abritent plus près d'elles des planètes comme la Terre. Tous les astronomes veulent le croire.
(1) Une unité astronomique (UA) correspond à la distance Terre-Soleil.
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