« Vous avez devant vous un directeur heureux. » Cette phrase de Jan Wörner, directeur général de l’ESA, en ouverture de la conférence de presse clôturant la conférence ministérielle de l’Europe spatiale, donne sans ambiguïté l’humeur du jour. Les pays européens ont clairement donné à leur agence spatiale les moyens de ses ambitions : 14,4 milliards d’euros à dépenser sur cinq ans, entre 2020 et 2025. Après avoir, de satisfaction, répété trois fois ce montant, Jan Wörner a précisé que 12,5 milliards étaient planifiés sur trois ans, jusqu’en 2023. Dans tous les cas, c’est davantage que l’ESA ne demandait, ce qui dénote une forte volonté politique des pays membres de soutenir les activités spatiales.
Dans cette enveloppe, l’Allemagne est le premier contributeur avec 3,3 milliards d’euros. La France est deuxième contributeur, à hauteur de 2,7 milliards (soit un peu plus de 18%). L’Italie est troisième avec 2,3 milliards.
L’accès indépendant à l’espace reste prioritaire
Parmi les objectifs de ces prochaines années figure le développement de nouveaux lanceurs, Ariane 6 et Véga C, destinés à maintenir l’indépendance d’accès à l’espace de l’Europe. Frédérique Vidal, ministre française de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, a d’ailleurs souligné la complémentarité consolidée entre Ariane 6 et Véga C. Et aussi à contrer la concurrence des entreprises privées américaines sur le marché des lancements de satellites. La fusée Ariane 6, déjà en cours de construction, bénéficiera du budget nécessaire pour évoluer vers la technologie du réutilisable. Notamment, le développement du prototype de moteur Prometheus sera assuré.
Concernant les moyens de transports spatiaux, une navette réutilisable automatique (non habitée), appelée Space Rider, sera également mise au point. En tout, 2,2 milliards seront consacrés aux moyens d’accès à l’espace.
Le graphique ci-dessous détaille la répartition du budget voté (en millions d’euros pour trois ans, les nombres entre parenthèses concernant les deux ans supplémentaires jusqu’à 2025).
La mission Hera finalement financée
La science spatiale obtient 1,7 milliard sur trois ans. À ce chapitre, bien que classée dans la catégorie « sécurité spatiale », la mission Hera, qui doit approcher l’astéroïde de 780 m de diamètre Didymos A, et qui jusque-là n’était pas financée, a finalement été adoptée. Cette sonde ira observer le petit satellite naturel de Didymos A, Didymos B (160 m de diamètre) qui aura été la cible d’un projectile lancé par la sonde américaine Dart en septembre 2022. Hera devrait être lancée en octobre 2024 et son objectif principal sera de mesurer le résultat de l’impact provoqué et d’obtenir pour la première fois des données sur les possibilités qui existent de dévier un astéroïde qui menacerait d’entrer en collision avec la Terre. Nous détaillons le principe de la mission Hera dans le Ciel & espace 568, p. 28, actuellement en kiosque.
En outre, l’ESA participera à la mission de retour d’échantillons martiens menée par la Nasa en fournissant un module orbital chargé de récupérer le module de surface après son décollage de la planète rouge.
Le détail des décisions et des budgets par activité ou mission est à retrouver sur le communiqué de presse de l'ESA (en anglais).