Observer Mars au télescope n’est jamais facile. Et les occasions sont rares : la planète rouge ne s’approche suffisamment que tous les deux ans. Mais cela vaut la peine d’essayer. Spécialement maintenant et pour les quatre semaines qui viennent. Car Mars n’est qu’à un peu plus de 62 millions de kilomètres, ce qui lui procure un diamètre apparent généreux de plus de 22 secondes d’arc. Même avec un instrument d’astronomie de 100 mm de diamètre, on peut donc discerner à sa surface des détails étonnants. L’occasion est unique car, dans deux ans, en novembre 2022, Mars ne restera qu’à 81 millions de kilomètres pour offrir un diamètre apparent de 17’’ d’arc. En janvier 2025, ce sera 96 millions de kilomètres et 14’’. En février 2027, 101 millions de kilomètres et 13,8’’…
Ces derniers jours, Jean-Luc Dauvergne, journaliste à Ciel & espace, et Emmanuel Beaudoin, collaborateur régulier du magazine, ont réussi de très beaux clichés de la planète rouge. Ils utilisent respectivement des télescopes de 300 et 355 mm. Et lors de nuits à l’atmosphère stable, ils ont saisi de très fins détails à la surface de Mars.
Mars le 22 septembre 2020
Le 22 septembre, peu avant 2 h, Jean-Luc Dauvergne a obtenu la vue de Mars ci-dessous. outre les nuages bleus qui entourent le pôle Nord plongé dans l’hiver, on y discerne le cratère Schiaparelli (450 km de diamètre), comme une encoche claire en bordure nord de la formation sombre Sinus Meridiani (au centre et à droite de l’image). Le cratère n’est pas visible grâce à son relief, comme c’est le cas des cratères lunaires, mais à sa différence de teinte avec la région environnante.
D’ailleurs, un autre grand cratère est visible, sur le bord droit de la planète, car il est souligné par ce qui semble être un trait blanc : il s’agit du cratère Huygens, qui est de dimension comparable à Schiaparelli. La teinte blanche qui permet de le remarquer correspond peut-être à des brumes accumulées dans son arène. Enfin, tout contre le bord gauche, sous une fine couche brumeuse, apparaît la partie orientale du grand canyon Valles Marineris, long de 4500 km et découvert en 1971 par la sonde Mariner 9.
Trente minutes plus tard, la planète a légèrement tourné sur elle-même quand Emmanuel Beaudoin la photographie (ci-dessous). Cette fois, Valles Marineris a progressé vers la droite. Et au bord droit, Hyugens a disparu. Entre les deux, Schiaparelli est toujours là, bien visible. Comme sur le cliché précédent, la calotte polaire sud, de plus en plus réduite par l’avancée de l’été austral, est aisément reconnaissable.
Le plus grand canyon du Système solaire à portée de télescope
Les détails visibles sur ces photos prises avec des télescopes d’un diamètre conséquent sont-ils observables, visuellement, dans des télescopes plus petits ? Pour Valles Marineris, cela ne fait aucun doute : un télescope de 200 mm permet de la voir assez confortablement car elle apparaît assez contrastée. Un télescope de 150 mm est suffisant pour la discerner. En dessous, cela devient un vrai défi. N’hésitez pas à nous faire part de vos observations !
Dans tous les cas, un instrument de 100 mm suffit pour voir l’encoche du cratère Schiaparelli et discerner les contours des différentes zones sombres de la planète. De plus, l’apparition de nuages sur les volcans géants du plateau de Tharsis ou dans le bassin d’impact de Hellas peut être remarquée avec un instrument de cette puissance.
Bien préparer ses observations
Encore faut-il savoir comment observer. Mars exige de la patience car il faut que l’œil s’habitue à percevoir les délicates nuances à sa surface. Il faut enfin savoir à quelle heure observer pour que les formations recherchées soient visibles depuis la Terre. Par exemple, ces jours-ci, Valles Marineris reste observable en toute fin de nuit (à partir de 6 h, soit 4 h TU). Mais cela ne va pas durer : à partir du 2 octobre 2020, il fera trop jour pour l’observer. Son retour en nocturne ne se fera qu’une semaine plus tard, à partir du 9 octobre après le coucher du Soleil.