Pour survivre dans l’espace, certaines espèces n’ont pas besoin de combinaison spatiale. C’est le cas de Deinococcus radiodurans, une bactérie revenue saine et sauve d’un séjour de 3 ans passé sur les parois externes de la station spatiale internationale (ISS). Rentrées sur Terre le 2 août 2018 à bord d’un vaisseau Dragon de l’entreprise Space X, les colonies de bactéries ont depuis été analysées par des chercheurs de l’université de Tokyo. Dans une publication parue le 26 août 2020, ces derniers ont indiqué que parmi les dizaines d’échantillons qu’avaient préparés l’astronaute Scott Kelly en 2015, ceux d’une épaisseur supérieure à un demi-millimètre avaient survécu.
À la surface de chaque petite pastille large de 2 mm, les bactéries exposées directement au rayonnement UV du Soleil sont mortes. Mais elles ont servi de barrière protectrice à leurs consœurs en dessous. Dans les années 1990, un autre microbe baptisé Bacillus subtilis avait survécu à 6 ans d’exposition spatiale, à bord du satellite Long Duration Exposition Facility de la Nasa. Cette fois-ci néanmoins, les chercheurs estiment avoir poussé plus loin leur expérience, baptisée Tanpopo (pour « pissenlit » en japonais). En ayant récupéré d’autres échantillons intermédiaires, après 1 puis 2 ans d’exposition seulement, ils ont pu extrapoler la durée ultime de survie des bactéries sur les flancs de l’ISS : entre 15 à 45 ans. Et entre 2 et 8 ans dans le cas de petites colonies de bactéries qui flotteraient librement dans l’espace interplanétaire, donc en l’absence des parois protectrices de l’ISS.
Fuite de vie entre planètes
Un temps trop court pour rallier une autre planète depuis la Terre ? Pas forcément, d’après la publication de l’équipe de Yuko Kawaguchi. Pour une météorite voyageant entre Mars et la Terre par exemple, le périple peut durer jusqu’à des millions d’années. Mais certaines roches, bien que statistiquement moins nombreuses, complètent le voyage en quelques années seulement. La survie des bactéries dans l’espace laisse ainsi entrouverte l’hypothèse d’un transfert de vie d’un monde à un autre. Une théorie formulée sous le nom de « panspermie » en 1908, par le prix Nobel de chimie suédois Svante Arrhenius. Que ce soit à dos de météorites éjectées lors d’impacts (« lithopanspermie ») ou sous la forme de petites colonies de bactéries agglomérées (« massapanspermie »), les mesures réalisées sur Deinococcus radiodurans permettent de mieux calculer les chances qu’ait déjà eu lieu une telle fuite de vie entre planètes. Une théorie jugée farfelue pour les uns, pas impossible pour les autres. En avril 2020, les chercheurs Amir Siraj et Avi Loeb estimaient le nombre d’astéroïdes déjà venus raser notre atmosphère, et qui auraient collecté au passage des bactéries en suspension à haute altitude – ce qui est le cas pour certaines espèces de la famille Deinococcus. Résultat : entre 10 et 1000 potentiels porteurs de vie sillonneraient notre système solaire…
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