C’est parti ! Un peu plus de six mois après avoir atteint l’astéroïde Ryugu, sur lequel elle a déjà largué les petits atterrisseurs Minerva et Mascot, la sonde japonaise Hayabusa 2 vient d’entamer la séquence la plus périlleuse de sa mission : une descente vers la surface où, à l’aide d’un petit projectile ultra-véloce, elle devra récolter ce soir – vers minuit – une centaine de milligrammes de poussières d’astéroïde. Ces échantillons seront rapportés sur Terre fin 2020.
Joint par téléphone au centre de contrôle de l’agence spatiale japonaise, le planétologue Patrick Michel (observatoire de la Côte d’Azur) trahit une certaine fébrilité. « Il y a vraiment de la tension, car le début de la descente a été plus compliquée que prévu. Il faut dire que manœuvrer une sonde de 600 kg pour qu’elle touche une zone de 6 m de diamètre sur un astéroïde distant de 300 millions de kilomètres, ça n’est pas simple. Nous pouvons encore décider d’interrompre la descente à tout moment... »
Guidée par son télémètre laser, Hayabusa 2 descend presque à l’aveugle à 40 cm/s vers un astéroïde qui s’est révélé particulièrement sombre. « Les marqueurs naturels, rochers ou autres, qui pourraient nous servir de repère ne sont pas très efficaces car le sol est vraiment très très noir », explique l’astrophysicien. Et par malchance, la borne artificielle lancée par Hayabusa 2 dans la zone d’atterrissage prévue s’est déplacée. « Nous ne savons pas exactement ce qu’il s’est passé. Elle a peut-être rebondi. Toujours est-il qu’elle est hors de la zone. Une zone d’ailleurs particulièrement étroite, qui a obligé l’équipe de navigation de repenser entièrement la stratégie de descente », explique l’astrophysicien.
Avant d’atteindre Ryugu, l’équipe de Hayabusa 2 imaginait pouvoir cibler une zone à peu près plane de 100 m². Mais la surface de l’astéroïde s’est révélée si chaotique qu’il a fallu se rendre à l’évidence : il n’y avait qu’une petite surface de moins de 50 m² que la sonde pouvait toucher sans trop de risque !
« Pour le moment, nous contrôlons la sonde quasiment en temps réel [elle se trouve à 19 minutes-lumière, NDLR]. Mais dans un peu plus d’une douzaine d’heures, lorsqu’elle sera suffisamment proche de Ryugu, elle passera en mode autonome » reprend Patrick Michel.
Délicatement, Hayabusa 2 posera sa trompe sur le sol de Ryugu. Un petit projectile le percutera à 1000 km/h et la sonde récoltera alors la poussière dispersée par l’impact, avant de s’éloigner rapidement. « Nous avons fait des simulations en laboratoire, mais comme nous n’avons aucune idée de la résistance du sol de Ryugu il est difficile de dire combien de grains on récupérera. Une chose est sûre : le filtre installé sur le cornet de récupération ne laissera pas passer de grains de plus de 1 cm. »
L'événement peut être suivi en direct à partir de 22h45 ce 21 février 2019 :