C’était « un cosmique » ! « Un homme qui voulait tout embrasser, qui avait un intérêt permanent pour tout ; de l’infiniment grand à l’infiniment petit, mais aussi des hommes », explique Jacques Arnould, expert éthique au Cnes et proche de Jacques Blamont. L’astrophysicien s’est éteint le 13 avril 2020, à l’âge de 93 ans. Véritable « icône » du domaine spatial, selon les mots de Jacques Arnould, il fut le premier directeur scientifique et technique de l’agence spatiale française et l’un des premiers à être convaincu, dès 1957 avec « l’Année géophysique internationale » et les fusées Véronique, de l’utilité de ces dernières pour la recherche scientifique.
Physicien, il s’intéresse à la haute atmosphère, à la forme de la Terre, puis au vent interstellaire et aux enveloppes cométaires. Il dirige le service d’aéronomie, œuvre au développement du spatial sur notre territoire et à l’international, participe aux grandes missions d’exploration du Système solaire, et conseille tous les présidents du Cnes. Ajoutons qu’il est élu membre de l’Académie des sciences en 1979 et que sa curiosité comme sa vive intelligence en font un « homme-source » incontournable pour tous les chercheurs du domaine spatial. « Il était au courant de tout et avait toujours 50 000 idées à discuter et à partager », confie Jacques Arnould.
La silhouette la plus familière du siège du Cnes, à Paris, est aussi l’auteur de nombreux ouvrages qui ne laissent pas indifférents. Dont « Le chiffre et le songe » (Odile Jacob), qui pointe l’orgueil et la déraison de l’Homme comme un des moteurs du savoir. Mais aussi de sa destruction potentielle avec « Introduction au siècle des menaces ». D’abord pessimiste, puis provocateur permanent — « une preuve de sa grande timidité », explique Jacques Arnould, qui cosigne avec lui « Lève-toi et marche, propositions pour un futur de l’humanité », Jacques Blamont va aussi se mettre en quête d’une âme collective, d’une « fédération » qui nous motiverait ensemble à trouver des solutions. Un lanceur d’alerte dont la lucidité ne pouvait se résoudre au fatalisme. L’originalité de ses idées est sa contribution évidente aux défis du futur.