Quelque 595 millions de kilomètres… C’est ce qui sépare la planète Jupiter de la Terre le 3 novembre 2023. Cela peut sembler énorme — le Soleil lui-même n’est qu’à 150 millions de kilomètres de nous. C’est pourtant la plus courte distance entre notre petite planète bleue (12000 km de diamètre) et la plus grosse planète du Système solaire (143000 km) au cours de l’année.
Une planète visible même en ville
La nuit, Jupiter est aisément visible à l’œil nu, même depuis le cœur des plus grandes villes. Avec sa magnitude de -2,9, elle est l’astre le plus brillant de tout le ciel après le Soleil, la Lune et Vénus ! La période se montre donc la plus propice à son observation au télescope, avec sensations assurées : ses formations nuageuses colorées offrent un spectacle marquant. Sans oublier la ronde de ses quatre lunes principales : Io, Europe, Ganymède et Callisto.
Dès la fin du jour, Jupiter brille de mille feux sur l’horizon est. Nul besoin de connaitre les constellations (dont, le Bélier dans laquelle elle se trouve) pour la repérer. Ensuite, au fil de la nuit, elle monte droit jusqu’à culminer très haut dans le ciel vers minuit et demie. Cette position élévée sur l’horizon (entre 54° et 60° pour la France) est une chance. Car la planète se trouve dégagée des couches les plus turbulentes de l’atmosphère, susceptibles de brouiller son image. Donc, en cas de bonne stabilité de l’air, c’est l’assurance de profiter d’images très détaillées de sa surface au télescope.
Des satellites visibles aux jumelles
Si vous n’avez pas d’instrument d’astronomie, vous avez peut-être une paire de jumelles. Calez-vous bien en vous accoudant sur un parapet ou même le capot d’une voiture, et visez la planète. Une fois la mise au point faite pour les deux yeux, regardez attentivement : vous voyez Jupiter comme un minuscule disque blanc très lumineux. Puis il y a fort à parier pour que votre œil soit attiré par de petits points brillants plus ou moins alignés qui l’encadrent. Il s’agit des plus gros satellites de Jupiter, ceux découvert en 1610 par l’astronome Galilée. Selon leur configuration, vous pouvez en voir jusqu’à quatre. S’il y en a moins, c’est qu’un ou plusieurs d’entre eux sont devant ou derrière la planète (donc invisibles aux jumelles).
Par exemple, le 3 novembre vers 23 h, Europe se trouve à gauche de la planète Jupiter. Les trois autres satellites galiléens — Ganymède, Io et Callisto — sont alignés à sa droite.
Des nuages et des éclipses
À la lunette ou au télescope, avec un grossissement d’une cinquantaine de fois, on voit à la fois les satellites et les principales formations nuageuses à la surface de Jupiter. Deux bandes sombres situées de part et d’autre de l’équateur jovien sont évidentes notamment. Pour déceler la Grande Tache rouge, qui est un anticyclone aussi grand que la Terre, mieux vaut utiliser un grossissement d’au moins 80 fois. Mais attention : Jupiter tourne très vite sur elle-même, en moins de 10 h. La Grande Tache rouge n’est donc pas toujours face à la Terre. Si vous ne la voyez pas, une observation quelques heures plus tard ou le lendemain à la même heure peut vous donner une bonne chance de la voir.
Il arrive assez souvent qu’un des satellites galiléens passe devant la planète. En quelques minutes, on le voit s’approcher du bord de Jupiter, puis entamer son transit. Mais autour de l’opposition, quasiment en même temps et à la même position, son ombre se projette sur la planète. Celle-ci prend l’aspect un point noir très contrasté. C’est par exemple le cas dans la nuit du 3 au 4 novembre 2023, avec Europe. A 2 h 15 du matin (le 4), en même temps que le satellite commence à traverser le disque jovien, son ombre apparait sur les nuages de la planète. Un observateur situé sur Jupiter, à l’endroit de l’ombre assisterait à une éclipse totale de Soleil ! Ce transit, dont l’observation la plus confortable est à réaliser vers 3 h 30, se finit peu après 4 h 30.
Toutes ces observations peuvent être réalisées avec un instrument de diamètre modeste. Une petite lunette de 60 mm dotée d’un grossissement de 100 X les permet sans problème. Bien entendu, un télescope de plus de 150 mm capable de supporter des grossissements de 200 X et plus offre une vision plus confortable.
L’opposition a lieu le 3 novembre à 10 h 44 TU (11 h 44 en France), mais pendant tout le mois de novembre, Jupiter reste très proche de la Terre. Aussi, en cas de mauvais temps ce soir-là, rien n’est perdu !
Pour en savoir plus, écoutez notre podcast éphémérides consacré en partie à l’observation de la planète gazeuse.
N’oubliez pas Uranus !
Jupiter brille d’un éclat remarquable… Cela ne doit pas occulter une autre planète, située tout près sur la voûte céleste, dans la même constellation, et qui passe à l’opposition le 14 novembre 2023 : Uranus. Certes, elle est plus petite que Jupiter (51000 km de diamètre) et bien plus éloignée (2,8 milliards de kilomètres). Elle est donc bien moins brillante et peut difficilement être repérée à l’œil nu. Et au télescope, elle se présente sous la forme d’un disque minuscule qui oblige à grossir au moins 200 fois pour la distinguer des étoiles. Mais son observation vaut le détour pour sa couleur. Même dans un petit instrument d’amateur, Uranus est reconnaissable à son bleu profond. C’est, avec Mars et l’étoile double Albiréo, l’un des rares corps célestes à révéler aussi facilement une coloration très marquée.