Les faits sont têtus. Si l’on en croit l’analyse d’une cinquantaine d’échantillons de roches lunaires et terrestres réalisée par le Britannique Richard Greenwood, le Français Jean-Alix Barrat et leurs collègues, les impacts d’astéroïdes et de comètes postérieurs à la naissance à la Lune n’auraient apporté que “5 à 30 %” de l’eau de notre planète. Autrement dit, entre 70 et 95 % de l’eau actuelle étaient déjà présents sur notre proto-Terre lorsqu’un corps de la taille de Mars est venu s’y fracasser pour former la Lune (lire Ciel & Espace n°549).
Avant de parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont soigneusement comparé les rapports isotopiques de l’oxygène dans les roches prélevées lors des missions Apollo et dans des basaltes et des olivines terrestres. Verdict : ceux-ci sont extrêmement proches — ce qui souligne le grand mélange de la matière réalisé lors de la collision géante d’où est née la Lune — mais tout de même suffisamment différents pour pointer, sur Terre, un apport de matière postérieur à l’impact géant.
Pour rendre compte de l’infime différence de composition isotopique des roches lunaires et terrestres, de l’ordre de 3 à 4 millionièmes, cet apport n’a pu représenter au mieux que 30 % de la quantité d’eau actuelle, expliquent les chercheurs dans leur article de Science Advances. Il se trouve d’ailleurs que cette quantité est mal connue, car l’essentiel de l’eau de la Terre réside dans son manteau. Au final, si notre planète recèle actuellement l’équivalent de 12 fois tous les océans à sa surface, au lieu de 2, l’apport extraterrestre postérieur à la naissance de la Lune n’est que de 5 %...
Cette mesure conforte l’hypothèse d’une eau terrestre “primordiale”, accumulée pendant la phase d’accrétion de notre planète, mais pose de nombreuses questions. Comment expliquer par exemple qu’autant d’eau ait pu se maintenir sur Terre malgré la violence de l’impact qu’elle a subi ?
Pour en savoir plus, lisez notre interview exclusive de Jean-Alix Barrat, coauteur de la découverte.