Depuis le 13 juillet, les contours de ce que pourrait être le commandement militaire de l’espace annoncé par Emmanuel Macron étaient restés vagues. La ministre de la Défense, Florence Parly, les a précisés le 25 juillet dans un discours d’un peu moins de 30 minutes. La ministre a commencé par poser son constat : « Aujourd’hui, nos alliés et nos adversaires militarisent l’espace. » Et d’enchaîner avec la conséquence : « Nous devons agir, nous devons être prêts ».
Puis, en guise de contexte, elle a évoqué le satellite russe qui, voici environ un an, avait approché l’un des satellites militaires français : « Il a, depuis, laissé sa carte de visite à huit nouveaux satellites appartenant à différents pays ; des satellites espionnés, brouillés ou encore éblouis. Les moyens de gêner, neutraliser ou détruire les capacités spatiales adverses existent et ils se développent. Nous le savons, l’ombre de la menace est bien réelle. »
Face à un risque de voir l’espace « devenir un nouveau far-west », Florence Parly a insisté : « Disposer d’une défense spatiale renforcée est absolument essentiel. Car c’est de notre indépendance qu’il s’agit. » Elle a rappelé que bien des activités, des smartphones de chacun aux communications des forces armées, dépendent de nombreux satellites.
Un commandement basé à Toulouse
Elle a ensuite décliné les trois axes retenus pour élaborer la stratégie de défense spatiale de la France : « Premièrement, un grand commandement de l’espace sera créé le 1er septembre (…), sous l’autorité de l’armée de l’air, qui deviendra donc l’armée de l’air et de l’espace. » Celui-ci sera basé à Toulouse et comptera à sa création, 220 personnes. « Le commandement de l’espace aura pour rôle de fédérer et de coordonner tous les moyens consacrés au domaine spatial de défense, a déclaré la ministre. »
Une évolution de la loi
Le deuxième axe est juridique : « C’est tout notre environnement juridique que nous devons faire évoluer. Nos armées sont profondément légalistes et il ne peut y avoir d’évolution de notre doctrine sans évolution de la loi. » Cette modification se fera dans le respect du droit international, en observant deux principes : libérer la capacité d’action des armées et protéger les capacités spatiales française, qu’elles soient militaires ou civiles.
Florence Parly a tenu à préciser : « Nous ne sommes en aucun cas engagés dans une course aux armements. Notre priorité est de poursuivre nos efforts diplomatiques avec nos partenaires européens en particulier mais plus largement avec l’ensemble des Etats intéressés pour garantir un usage pacifique de l’espace. »
Des nanosatellites de surveillance et de défense
Enfin, le troisième axe consistera à « perfectionner nos capacités de défense spatiale. Car l’espace, c’est aussi un nouveau front à défendre. » La loi de programmation militaire ambitionne déjà de renouveler toutes les grandes capacités spatiales du pays, que ce soit sur le plan de la surveillance que sur celui de la défense active. Cela consistera à mieux surveiller nos satellites et à la défendre de nuisances ou d’agressions. Le radar Graves sera ainsi amélioré et le système de télescopes Tarot (CNRS) développé. A partir de 2023, des nanosatellites patrouilleurs devraient voir le jour et pouvoir « répondre aux actes hostiles de manière proportionnée dans le respect du droit international ». Pour cela, il faudra les doter de lasers. La ministre a dit : « Nous développerons des lasers de puissance. C’est un domaine dans lequel la France a pris du retard. Nous le comblerons. »
700 millions d’euros supplémentaires
Enfin, l’allocution s’est terminée sur l’enveloppe budgétaire prévue pour ces projets : « Sur la durée de sept ELPM (ndlr : exercices de la loi de programmation militaire), cet effort représente 700 millions d’euros supplémentaires en complément des 3,6 milliards d’euros déjà prévus pour le renouvellement complet de nos capacités satellitaires. »
Florence Parly a conclu en soulignant « l’importance capitale de notre indépendance d’accès à l’espace », une forme de soutien appuyé au développement du lanceur Ariane 6.