Le nouveau système optique du télescope américain Gemini Sud est si précis qu'il est capable de montrer des changements dans la nébuleuse d’Orion en l'espace de seulement 5 ans.
La sphère des fixes se met en mouvement
Les échelles dans l’Univers sont si grandes que l’aspect du ciel est totalement statique à l'œil nu en dehors des objets du Système solaire. Pour beaucoup de télescopes, la situation n'est guère différente.
Mais nous vivons une époque formidable : les télescopes les plus puissants du monde parviennent à détecter des mouvements sur des cibles vues jusqu'ici comme fixes ! C'est le cas de la nébuleuse d’Orion observée par le télescope de 8,2 m Gemini Sud.
« Ce que l'on voit, ce sont des boules de gaz éjectées d'une zone de formation d'étoiles », explique l'astronome français Benoît Neichel, responsable du nouveau système optique du télescope, dont il expliquait le fonctionnement dans un article précédent.
En comparant les images prises à 5 ans d’intervalle, on voit des condensations bleues avancer. « Les étoiles qui se sont formées récemment ont éjecté ces boules de gaz bleues. Quand elles traversent le milieu interstellaire, elles interagissent avec le gaz local (de l'hydrogène). Ce sont ces grands piliers visibles sur cette image », ajoute Benoît Neichel.
Ci-dessous : la différence entre les images prises à 5 ans d’intervalle. © Gemini Observatory/Aura.
Contrer la turbulence
La nébuleuse d'Orion est la plus brillante du ciel pour les observateurs de l’hémisphère Nord. Lorsqu’un télescope de 8 m de diamètre comme le Gemini Sud, installé au Chili, la vise, il n'en voit qu’une petite portion.
Le problème pour ces télescopes est la turbulence atmosphérique qui limite leur résolution. Ses effets sont même visibles à l'œil nu — c'est ce qui fait scintiller les étoiles. Pour lutter contre elle, les astronomes ont mis au point des systèmes appelés optiques adaptatives. Le Gemini est équipé du système de ce type le plus abouti au monde.
Pour analyser les déformations de l’atmosphère, le télescope Gemini
utilise 5 étoiles artificielles crées par un laser. © Gemini Observatory.
L'image prise il y a 5 ans a été réalisée avec l'instrument Altair. Son champ était plus petit que celui du système actuel baptisé Gems. Celui-ci procure des images plus homogènes, plus fines et avec 16 fois plus de pixels !
Le zoom dans l’animation ci-dessous permet de mieux apprécier
le progrès entre les deux instruments. © Gemini Observatory/Aura.
Une étape vers les géants.
Gems est constitué de trois miroirs déformables capables d'effectuer 400 à 1000 corrections par seconde ! La maîtrise de tels systèmes est indispensable pour développer les télescopes géants de prochaine génération, dont les miroirs auront un diamètre de 30 à 40 m, comme l'EELT européen !
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