C'est une avancée majeure dont tous les champs de la recherche en astronomie vont bénéficier. La première moisson de données de Gaia, publiée en septembre 2016, avait permis de positionner plus d'un milliard d'étoiles sur la voûte céleste avec une précision inédite. Ce mercredi, la seconde moisson est un véritable bond de géant : non seulement les astronomes ont désormais accès à la position de 1,7 milliards d'étoiles, mais aussi à leur éclat, à leur mouvement sur le ciel, et à la vitesse radiale (la composante de leur mouvement sur la ligne de visée) de 7 millions d'entre elles ! Encore cette quantité phénoménale de données n’est-elle le fruit que de 22 mois de récolte, entre juillet 2014 et juin 2016...
Lancée en décembre 2013 par l'ESA pour une mission de cinq ans (depuis prolongée jusqu'à fin 2020), Gaia est une formidable machine à arpenter les étoiles, qu'elle analyse sous trois angles : astrométrique, afin de connaître leur position ; photométrique, pour quantifier précisément leur éclat ; spectroscopique pour mesurer leur vitesse. Toutes ces données sont transmises sur Terre au DPAC (Data Processing and Analysis Consortium), un groupe de 450 astronomes chargés de les traiter et de les rendre exploitables. Grâce au volume de données qu'elle produit – depuis le point de Lagrange où elle orbite à 1,5 millions de kilomètres de la Terre – Gaia devrait conduire à une nouvelle vision de la structure en 3D de la Voie lactée, mais aussi de son origine et de son évolution.
Des astéroïdes aux naines blanches
La publication de ce second catalogue est accompagnée de plusieurs études scientifiques dont le but est de valider la qualité des données et d’en tirer les premières informations. L'une, qui s'appuie sur les vitesses radiales de plus de 7 millions d’étoiles – le plus grand catalogue jamais réalisé et également le seul à couvrir la totalité du ciel – confirme l'existence d'un étrange phénomène dans la Voie lactée : les étoiles situées à l’extérieur de son disque ont tendance à se rapprocher du centre, alors que celles à l’intérieur du disque vont plutôt vers l’extérieur. L’origine de ce comportement reste à expliquer...
Une seconde étude portant sur la luminosité des étoiles a permis de considérablement affiner le diagramme Hertzsprung-Russell, qui met en regard la luminosité des étoiles en fonction de leur couleur ou leur température. Grâce au volume de données et à la précision de Gaia, "on s'attendait à ce que le diagramme HR soit beaucoup plus beau, beaucoup plus fin, mais on ne s'attendait pas à une si grosse différence" explique Carine Babusiaux de l'observatoire de Grenoble. Cette étude met notamment en avant deux populations de naines blanches distinctes. Le nouveau diagramme HR, qui rassemble 4 millions d'étoiles situées jusqu'à 5000 années-lumière, promet de belles avancées dans le domaine de l'archéologie galactique.
Une troisième étude montre, pour sa part, l'intérêt de Gaia pour l'étude du système solaire. La sonde de l'ESA a pu mesurer la position de 14 000 astéroïdes dans tout le système solaire avec une précision près de 1000 fois supérieures aux mesures précédentes. Ce catalogue facilitera l’étude des collisions à l’origine des astéroïdes de la ceinture principale, ainsi que la prévision des occultations d'étoiles par des astéroïdes. C'est aujourd'hui le seul moyen de connaître leur forme et leur taille quand ils orbitent au-delà de Neptune.
Fin de la mission en 2023 ?
Le deuxième catalogue de données présenté aujourd’hui n’est pas le dernier. Un troisième est prévu en 2020, avant la publication du catalogue final en 2022. Gaia poursuit sa mission jusqu’en 2020, mais pourrait être active jusqu’en 2022 ou 2023. L’incroyable précision de ses observations occupera les astronomes pendant une longue période et peut-être que leurs découvertes nous ferons revoir nos manuel d’astronomie.