Un congrès d’astronomie raconté de l’intérieur (III)

Première journée au congrès de l’IAUS329. © Y. Nazé
Le congrès scientifique : un grand classique dans la vie du chercheur ! L’astrophysicienne Yaël Nazé nous dévoile les coulisses de l'un de ces rendez-vous professionnels, qui se tient à Auckland, en Nouvelle-Zélande, du 28 novembre au 2 décembre 2016. Au menu du premier jour : les explosions d’étoiles massives.

Aujourd’hui, on explose (les étoiles)

Premier jour du congrès de l’IAUS329. J’installe mon poster [présentation scientifique en panneau, NDLR ; voir liste de ceux de l’IAUS329], après avoir demandé à un collègue le numéro qu’il porte. Chacun a une place réservée, pas question d’aller ailleurs. Après, je m’installe à l’une des tables rondes. On n’est pas dans un auditoire, cette fois-ci. J’accapare un bloc-notes et, le bic levé, j’attends le signal de départ (oui, je sais, je pourrais utiliser l’ordi, mais je préfère le bon vieux papier).

Le symposium commence comme toujours par une partie officielle, non scientifique : à part le mot de l’organisateur pour les infos organisationnelles du jour, il y a bien sûr le mot de bienvenue d’un boss (cette fois, Richard Easther, le chef des astronomes d’Auckland). Mais le plus intéressant était une innovation : un mot de bienvenue en maori suivi de sa traduction en anglais, qui se termine avec un chant traditionnel.

Un beau rappel que nous sommes ici sur la terre conquise il y a bien des siècles par ce peuple fier, très attaché à sa culture. Rappeler l’identité locale en ouverture, en oubliant en plus les politiciens de service (l’intervention classique du ministre machin qui monopolise le crachoir pour ne pas dire grand-chose), c’est assez rare pour être souligné.

Loin des cocotiers

Cependant, quand on parle de congrès dans un pays lointain, les gens imaginent souvent qu’on passe la majorité du temps dehors, sous les cocotiers. Eh non, la plupart du temps, on pourrait être en plein milieu d’une banlieue française plutôt qu’en Nouvelle-Zélande, on ne s’en rendrait même pas compte. Forcément : on reste bloqué dans la salle de conférences et ses annexes, sans fenêtre, toute la journée.

Et une journée, c’est long, quoiqu’on a de la chance cette fois-ci, les organisateurs ont été miséricordieux, on commence à 9 h et on termine à 17 h (j’ai connu pire, avec des sessions de 8 h à 18 h 30, où l’on finissait sur les genoux).

Évidemment, il y a toujours des exceptions. Par exemple, il est courant d’ajouter des “splinter sessions” le soir, et l’IAUS329 ne fait pas exception. Demain, on termine donc le symposium à 17 h 10, et on enchaîne sur le splinter à 18 h (on devrait terminer avant 20 h, si tout va bien). Le tout avec une pause déjeuner réduite, avec buffet sur place, pour minimiser le temps perdu.

Bref, on n’est pas là pour rigoler, on bosse, quoi. Parfois, on a aussi des conférences plus larges le soir, mais ici, c’est remplacé par la session de samedi dédiée au grand public. Ouf !

Pause café et afternoon tea

En tout, pendant tout ce temps, il y en aura 70 exposés. Ils se classent en deux types : les invités, de 20 min, et les proposés, de 15 min (lire épisode 1). Il faut y ajouter des temps de discussion, après chaque exposé et, en milieu de semaine, une session “poster” qui permet officiellement de jeter un œil aux posters (officieusement, on le fait aussi pendant les pauses, après journée, ou sur le temps de midi), et puis un résumé faisant la clôture du colloque.

Bien sûr, de temps à autre, il y a une pause, fixée à 40 minutes, mais comme on déborde toujours un peu (les astronomes sont bavards !), c’est plutôt 20 minutes en réalité. Ici, le matin, c’est pause-café, et l’après-midi, thé (ah, l’influence anglaise ! c’est bien la première fois que j’ai un afternoon tea, et non un coffee break). Particularité kiwi : les boissons chaudes sont accompagnées de petites tartes salées type quiche lorraine !

Bon, ce n’est quand même pas le purgatoire. Il faut ajouter qu’il est de tradition d’avoir une demi-journée de libre pour découvrir la culture locale : mercredi, nous embarquerons pour une balade au sommet du volcan voisin. Vous en saurez plus dans deux jours !

Au menu du jour : les supernovae

Aujourd’hui, on explose. Les étoiles, pas les bouchons de champagne. La journée est en effet consacrée aux supernovae marquant la fin des étoiles massives. Les différents orateurs ont montré que si les observations se multiplient et les modèles se perfectionnent, on est encore loin de comprendre parfaitement ces événements.

L'explosion de supernova la plus récemment observée à faible distance, SN1987A. © Nasa

Et donc forcément, les opinions divergent sur certains points : est-ce que les supernovae ne présentant pas de raie d’hélium proviennent d’objets qui en sont totalement dépourvus, ou l’hélium est-il simplement caché parce que la matière ne se trouve pas à la bonne température pour présenter sa signature habituelle ?

Les supernovae de type Ib ou Ic proviennent-elles exclusivement d’étoiles binaires massives, ou bien parfois d’une étoile isolée ? Les masses assez faibles estimées pour quelques supergéantes rouges ayant explosé sont-elles réelles (et liée à un amaigrissement forcé de l’étoile en phase terminale), ou est-ce juste un problème d’interprétation d’observation ?

Et quel est le rôle exact des éjections pré-explosion qui ont modifié l’environnement de l’étoile mourante, parfois suivant un axe différent de celui de l’explosion subséquente ? Le plus amusant est sans doute les théoriciens reconnaissent qu’il est toujours difficile, voire quasi impossible, de simuler l’explosion d’une étoile massive !

 

Découvrez les autres billets de Yaël Nazé sur le congrès d'Auckland, consacré aux étoiles massives.

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