Pour la première fois depuis 9 ans et l’arrêt des navette spatiales, des astronautes américains vont décoller à bord d’un vaisseau américain, propulsé par une fusée américaine, depuis le sol américain. Si tout se déroule comme prévu, à 22 h 33, heure française (16 h 33 sur la côte est des Etats-Unis), ce 27 mai, Robert Behnken et Douglas Hurley quitteront l’aire de lancement 39A du Centre spatial Kennedy, en Floride pour rejoindre la Station spatiale internationale (ISS). Cette fois, ce ne sera pas grâce à un Soyouz russe mais grâce à la fusée Falcon 9 et la capsule Crew Dragon développés par la société américaine privée Space X. Le lancement est à suivre en direct sur Nasa TV.
Launch America
Aux Etats-Unis, l’événement suscite assez de fierté pour que le président Donald Trump lui-même fasse le déplacement depuis Washington pour assister au lancement. La mission, qui doit permettre de qualifier définitivement le nouveau vaisseau Crew Dragon s’appelle Demo 2. En effet, un premier vol sans astronautes, Demo 1, avait déjà eu lieu en mars 2019. Mais outre-Atlantique, on appelle plus volontiers ce vol d'essai « Launch America » (lancement Amérique) et on le qualifie d’historique. Sans doute est-ce quelque peu exagéré pour une nation qui, plus de 50 ans auparavant, avait réussi l’exploit autrement plus historique d’envoyer des hommes marcher sur la Lune. Mais la perte de l’indépendance d’accès à l’espace pour la patrie de l’Oncle Sam était de plus en plus difficile à supporter pour la Maison Blanche qui a affiché son objectif : redevenir la première nation spatiale. En outre, la facture va baisser : chaque vol d’un Américain à bord d’un Soyouz coûtait environ 70 millions d’euros à la Nasa. En regardant s’élever la fusée Falcon 9 emportant Behnken et Hurley dans l’espace, Donald Trump assistera à l’aboutissement de choix décidés par son prédécesseur Barack Obama.
Un lancement avec récupération
Si la météo est favorable et si aucun incident technique ne retarde le lancement, Demo 2 devrait décoller à 22 h 33 (16 h 33 en Floride). Les 9 moteurs du premier étage de la fusée Falcon 9 propulseront la capsule Crew Dragon pendant 2 minutes et 33 secondes. Trois secondes plus tard, le premier étage se séparera et commencera ses manoeuvres en vue de son atterrissage en douceur sur une barge postée dans l’Atlantique au large de la Floride, 9 minutes et 22 secondes après le lancement, selon un scénario maintenant bien connu. Cet étage sera donc récupéré en vue de sa réutilisation. Pendant ce temps, le deuxième étage de Falcon 9 aura pris le relais et accélèrera la capsule Crew Dragon jusqu’à son orbite. Il se séparera à son tour 12 minutes après le lancement.
En cas de problème au moment du lancement ou pendant la phase d’ascension de la fusée, la capsule Crew Dragon peut s’éjecter rapidement grâce à des moteurs disposés tout autour d’elle. Alors, elle revient sur Terre en suivant une trajectoire balistique avant de déployer ses parachutes pour permettre le retour des astronautes en toute sécurité. Ce dispositif a été testé et, malgré une explosion spectaculaire, semble aujourd’hui au point.
Une mission à durée indéterminée
Une fois en orbite, les deux astronautes, qui ont déjà chacun à leur actif deux missions à bord des navettes, disposeront d’environ 24 heures pour effectuer plusieurs manœuvres et s’approcher progressivement de l’ISS et s’y amarrer, aux alentours de 23 h 30, le 28 mai. Ce n’est qu’une fois sur place – et probablement pas dès les premiers jours - qu’ils sauront combien de temps ils vont y séjourner. Cela devrait être au minimum un mois. La décision dépendra de l’état de préparation de la mission suivante de Space X, la première du programme commercial signé par la Nasa avec la société privée. Car Demo 2 est encore un vol d’essai. Le suivant, appelé Crew 1, devrait permettre à quatre astronautes, Victor Glover, Mike Hopkins, Shannon Walker (Américains) et Soichi Noguchi (Japonais) de partir pour un premier séjour « régulier » dans l’ISS. Il pourrait intervenir à la fin de l’été 2020. Cinq autres missions similaires ont été commandées à Space X par la Nasa.
Behnken et Hurley reviendront sur Terre avec la même capsule qui les aura emmenés dans l’espace. Les vaisseaux Dragon sont conçus pour un retour qui se déroule dans l'ocean au terme d'une descente sous quatre parachutes (son concurrent, de Boeing, la CST-100 Starliner, se pose sur la terre ferme). Pour ce vol d’essai, la mission se terminera dans l’océan Atlantique, au large de la Floride. En effectuant son troisième vol spatial, Doug Hurley, 53 ans, se singularisera en étant le premier astronaute à avoir participé à deux missions américaines consécutives. En effet, il était à bord de la dernière navette, Atlantis, en 2011.