« Nous sommes dans la partie haute de la fourchette. C’est de bon augure pour la suite », se réjouit Benoît Mours, au Laboratoire d’Annecy-le-Vieux de physique des particules (Lapp). Il y a encore quelques mois, les chercheurs engagés comme lui dans les collaborations Ligo et Virgo ne savaient pas vraiment ce que leur réserverait le ciel. Après des années de développement, leurs instruments allaient-ils devoir patienter encore longtemps avant de détecter enfin une onde gravitationnelle ? L’Univers hébergeait-il suffisamment d’objets célestes capables d’émettre ces ondes, en particulier des objets compacts en train de fusionner ? « Les prédictions variaient d’un facteur dix mille... », se souvient le chercheur.
Avec la première détection d’une onde gravitationnelle le 14 septembre 2015 (annoncée le 11 février 2016 après une longue analyse) et une deuxième le 26 décembre (annoncée ce 15 juin 2016), les voilà rassurés. D’autant qu’elles ont eu lieu au cours de la toute première période d’observation d’Advanced Ligo (du 12 septembre 2015 au 19 janvier 2016).
« En septembre, les deux détecteurs de Ligo commenceront une nouvelle prise de données avec une sensibilité encore meilleure. Nous espérons aussi que Advanced Virgo pourra les rejoindre avant la fin de l’année », reprend Benoît Mours.
Fusion de deux trous noirs
GW151226, le nom donné à l'événement annoncé aujourd'hui, a impliqué deux trous noirs de 8 et 14 masses solaires, qui ont fusionné en un seul de 21 masses solaires à 1,4 milliard d’années-lumière. Leur chute en spirale a provoqué l’émission d’un tremblement d'espace capté pendant une seconde par Ligo.
« Le signal était moins intense que pour GW150914, mais il a duré plus longtemps, car les masses en jeu étaient plus faibles », précise Benoît Mours. En février, les masses relativement importantes des deux trous noirs qui fusionnaient (29 et 36 masses solaires) avaient surpris. « Cette fois, nous sommes plus dans la norme. »
Alerte à tous les observatoires
Comme pour GW150914, la détection d’un signal gravitationnel a immédiatement déclenché une alerte à destination de télescopes dans le monde entier. « Nous avons une soixantaine de partenaires susceptibles de détecter un éventuel signal électromagnétique », explique Benoît Mours. Observer la lumière associée à l’émission d’une onde gravitationnelle permettrait de collecter de nombreuses informations sur l’émetteur. « Mais rien n’a été vu, ce qui était d’ailleurs attendu pour la fusion de deux trous noirs » reprend le chercheur.
De ce point de vue, l’absorption d’une étoile à neutrons par un trou noir, ou la coalescence de deux étoiles à neutrons, serait plus prometteuse. Un signal gravitationnel de ce genre sera-t-il capté avant la fin de l’année ?
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